Ils ont construit l’Europe
Si ces personnalités historiques ne sont pas les « pères fondateurs » du projet européen, ils ont par leurs actions et leurs idées, marqué la construction européenne.
Sommaire :
- Willy Brandt
- Hans-Dietrich Genscher
- Valéry Giscard d’Estaing
- Walter Hallstein
- Helmut Kohl
- François Mitterrand
- Helmut Schmidt
- Simone Veil
Willy BRANDT (1913-1992)
Willy Brandt, né Herbert Frahm le 18 décembre 1913 à Lübeck en Allemagne, a été chancelier de la République Fédérale d’Allemagne (Allemagne de l’Ouest) de 1969 à 1974. Il rejoint les jeunesses socialistes en 1929 et le parti social-démocrate (SPD) en 1930. En 1933 il fuit l’Allemagne pour échapper à la persécution Nazi et se réfugie en Norvège. Il adopte alors le pseudonyme Willy Brandt, qu’il gardera après la guerre, pour éviter d’être repérer par les agents du régime Nazi.
Il combat la Wehrmacht sous l’uniforme norvégien et se fait arrêter par les forces allemandes d’occupations en 1940. À sa libération, il fuit en Suède et ne reviendra en Allemagne qu’en 1946.
Élu député au Bundestag dès 1949, il est maire de la Ville-État de Berlin-Ouest de 1957 à 1966. Dans le cadre d’une grande coalition, il est nommé ministre des Affaires Étrangères de 1966 à 1969. Il s’implique alors pour permettre l’intégration du Royaume-Uni à la Communauté Européenne mais Charles de Gaulle, alors président français, y oppose un veto.
En 1969, il devient chancelier dans le cadre d’une coalition qui rassemble les sociaux-démocrates du SPD et les libéraux du FDP. Son mandat est marqué par la mise en place de l’Ostpolitik : une politique d’ouverture vers l’est afin d’apaiser les relations entre les deux Allemagnes et restauré quelques échanges de part et d’autre du rideau de fer.
Dans le cadre de cette politique, Willy Brandt négocie des traités de paix avec la Pologne et la Tchécoslovaquie en 1970 ; mettant un point finale à la seconde guerre mondiale. Il reçoit en 1971 le prix Nobel de la Paix pour son œuvre diplomatique avec l’Allemagne de l’Est, la Pologne et l’Union Soviétique.
À l’occasion du renouvellement de la gouvernance française en 1969, avec l’arrivée du président Georges Pompidou, ce dernier et le chancelier s’entendent lors d’un sommet de la CEE à la Haye pour l’intégration de nouveaux membres dans la communauté européenne : la Grande-Bretagne, l’Irlande et le Danemark rejoindront ainsi la CEE en 1973 (la Norvège le refusa par référendum).
Hans-Dietrich GENSCHER (1927-2016)
Il est né à Reideburg en RDA le 21 mars 1927 et mort le 31 mars 2016. Il fait des études de droit et devient avocat. Il entre en politique en 1946 au sein du LDP, (Liberal-Demokratische Partei, le parti libéral d’Allemagne de l’Est). En 1952, il quitte la RDA pour passer en RFA et milite au FDP (Freie Demokratische Partei, le parti libéral d’Allemagne de l’Ouest) où il occupe une fonction dirigeante de 1962 à 1964. Il devient membre du Bundenstag dès 1965. De 1969 à 1974, il devient ministre de l’intérieur lors d’une coalition SPD-FDP. Il participe aux deux gouvernements successifs dirigés par Willy Brandt. En 1974, il devient ministre fédéral des Affaires Etrangères et vice-chancelier, fonctions occupées dans le gouvernement d’Helmut Schmidt de 1974 à 1982, puis Helmut Kohl de 1982 à 1992.
Il fait preuve d’un grand attachement à la mise en œuvre du Marché Unique et à l’ouverture de la CEE en direction des pays de l’Europe Centrale et Orientale. Il est persuadé de la nécessité du renforcement du pilier franco-allemand qu’il juge indispensable. Il contribue à la relance du volet politique de la coopération européenne. Il propose, avec le ministre italien des Affaires Etrangères, Emilio Colombo, en 1981, un renforcement de la coopération politique européenne (CPE), aussi appelée plan d’« Acte européen », initiée à La Haye.
A ce titre, Genscher est un des initiateurs de ce qui deviendra en 1993 avec le traité de Maastricht, la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Il demande même la création d’une Union Monétaire Européenne.
De 1984 à 1985, il préside le Conseil de l’OTAN ainsi que le Conseil des ministres de l’Union de l’Europe Occidentale (UEO).
Dans le gouvernement d’Helmut Kohl, il contribue par son action et sa diplomatie infatigable à la chute du mur de Berlin et à la transition pacifique au moment de l’effondrement de la RDA. Il se fait le défenseur d’une réunification rapide de l’Allemagne qui constitue l’apogée de sa carrière.
Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020)
Il est né le 2 février 1926 à Coblence où son père était directeur des finances du Haut-Commissariat français en Rhénanie occupé alors par les forces françaises, il participe à la libération de Paris en août 1944. Il s’engage ensuite dans la 1er armée française sous le commandement de De Lattre de Tassigny.
Après polytechnique, il entre à l’ENA dont il sort 4ème en 1951, promotion Europe. Il entre à l’Inspection générale des finances. Ses débuts en politique ont pour toile de fond la concurrence entre Pierre Mendès-France et Antoine Pinay. Il est élu conseiller général du Puy de Dôme en 1958. Lors des débats de 1957 sur la ratification du Traité de Rome créant la CEE, il s’élève contre Mendès-France qui demande des délais.
Le 8 janvier 1959, il est nommé secrétaire d’État aux finances aux côtés d’Antoine Pinay et travaille en étroite relation avec Michel Debré, le 1er ministre. Le 18 janvier 1962, il devient ministre des finances et affaires économiques dans le gouvernement Debré et conserve ses fonctions dans le gouvernement Pompidou.
En 1966, il crée son propre parti, « les Républicains Indépendants » en affirmant que son parti constitue l’élément « centriste et européen » de la majorité. Le 1er janvier 1967, il émet des réserves sur la politique européenne menée par De Gaulle. Il devient maire de Chamalières dans le Puy de Dôme.
Aux élections législatives de 1968, 64 députés RI (Républicains Indépendants) sont élus. Il devient ministre des finances du gouvernement Pompidou le 20 juin 1969. Il conserve son poste de ministre sous les trois gouvernements Messmer, avec le rang de ministre d’Etat. Le 27 mai 1974, il est élu président de la République.
Il consacre un grand attachement à la construction européenne. Il souhaite améliorer les institutions communautaires.
Avec Helmut Schmidt, il est à l’origine de la création du Conseil européen en décembre 1974. La France est poussée à accepter l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct, mesure prévue par le Traité de Rome, à laquelle s’étaient opposés De Gaulle et Pompidou. Les premières élections ont lieu en 1979. Il milite pour l’Europe des neuf afin d’accueillir la Grèce (sortie de la dictature des colonels) en dépit de ses faiblesses économiques. Il resserre les liens avec l’Allemagne. Leur coopération donne naissance en 1978 au Système monétaire européen qui remplace le Serpent monétaire. L’ECU (pour European Currency Unit), l’unité de compte européenne est créée en 1979. Il s’implique dans le lancement de projets industriels comme l’Agence Spatiale Européenne. Il décède le 2 décembre 2020.
Walter HALLSTEIN (1901-1982)
Walter Hallstein né le 17 novembre 1901 à Maxence, mort le 29 mars 1982 à Stuttgart, professeur, haut fonctionnaire puis, après 1950, diplomate et homme politique chrétien-démocrate allemand. Premier président de la Commission de la Communauté Économique Européenne (CEE), considéré comme l’un des pères de l’Europe.
Il met en place le Marché Unique, la politique agricole commune (PAC) et surmonte les crises institutionnelles des années soixante.
A partir de 1950, il devient secrétaire d’État aux Affaires Étrangères dans le sillage de Konrad Adenauer qui le désigne comme chef de la délégation de la République Fédérale d’Allemagne (RFA). Il joue un rôle dans la mise en place de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA). Il rencontre Jean Monnet dont il partage les convictions.
En 1955, il représente son pays à la conférence de Messine où la RFA (l’Allemagne de l’Ouest), l’Italie et le Benelux demandent une relance de la construction européenne. A partir de 1956, il mène les négociations du Traité de Rome aboutissant en 1957 à la création de la Communauté Européenne de l’Énergie Atomique (EURATOM) et à la CEE. Il réussit à faire connaître les institutions européennes aux autres pays et à gagner la confiance des investisseurs.
Le plan HALLSTEIN : le 31 mars 1965, sa proposition relative au financement de la PAC, à la création de ressources propres de la CEE, approuvée par le parlement européen est repoussée par un veto du Général de Gaulle.
Le plan Hallstein prévoit que le Marché Unique devra être réalisé 30 mois avant l’échéance prévue par le Traité de Rome. Il propose d’élargir les pouvoirs de la Commission. L’assemblée parlementaire serait dotée de pouvoirs de contrôle budgétaire. En phase avec les idées de Jean Monnet, il imaginait une Europe Fédérale dotée d’un pouvoir exécutif.
Il dirige pendant près de 10 ans la Commission de la CEE et quitte Bruxelles en 1967.
Helmut KOHL (1930-2017)
Né le 3 avril 1930 à Ludwigshafen en Allemagne. Après des études en histoire, en droit et en sciences politiques et sociales, il occupe d’abord un poste de conseiller dans l’industrie chimique avant d’entrer en politique.
Député du Conseil Municipal de Ludwigshafen entre 1960 et 1966 et membre du Parlement du Land de Rhénanie-Palatinat, dont il devient ministre président en 1969. Il entame parallèlement une carrière niveau national.
Président de la CDU (démocratie chrétienne) dès 1973 et chef de groupe au Bundestag en 1976, il arrive au pouvoir en 1982, remplaçant Helmut Schmidt.
Nommé Chancelier de la République Fédérale d’Allemagne (RFA), il est réélu à quatre reprises et égale par sa longévité Konrad Adenauer.
Au niveau européen, le « moteur » franco-allemand, représenté par Helmut Kohl, François Mitterrand, Jacques Delors (président de la Commission) accélère considérablement l’intégration européenne, aboutissant en 1996 à la signature de l’Acte Unique.
Grâce au développement de la procédure de vote à la majorité et non plus à l’unanimité au Conseil des ministres et grâce à l’engagement personnel du chancelier, la présidence allemande du premier semestre 1988 remporte plusieurs succès, notamment la résolution de la crise budgétaire et l’adoption de décisions importantes en vue de la réalisation du marché unique.
Dès 1992, Helmut Kohl fait adopter à l’unanimité au congrès de la CDU une motion préconisant la mise en œuvre d’une constitution fédérale pour l’Europe afin de clarifier les attributions et de mettre en place un régime parlementaire pour les compétences de niveau européen.
François MITTERRAND (1916-1996)
Il est né le 26 octobre 1916 à Jarnac, mort le 8 janvier 1996 à Paris. Diplomé de Droit public et de Sciences Po, journaliste puis avocat.
Prisonnier des Allemands en 1939, il s’évade. A Vichy, il travaille au reclassement des prisonniers de guerre avant d’entrer en Résistance en 1943. Elu député en 1946, il est plusieurs fois ministre sous la IV° République notamment dans le cabinet de Pierre Mendès-France. Il devient, en 1958 l’un des principaux adversaires du Général de Gaulle en soutenant le « non » à la Constitution de la Vème République. En 1965 il participe à la création de la Fédération de la Gauche démocrate et socialiste et il est candidat aux élections présidentielles et atteint 45% au second tour.
Au congrès d’Epinay en 1971, il devient Premier Secrétaire du Parti Socialiste. En 1972, il signe avec les Radicaux de Gauche et le Parti Communiste le Programme commun de gouvernement de la Gauche. Il échoue à l’élection présidentielle de 1974 face à Valéry Giscard d’Estaing. Il est élu président de la République en 1981 puis réélu en 1988.
Il défend une Europe démocratique, l’engagement européen du parti socialiste et propose une démocratisation des Institutions européennes alors que se profile le premier élargissement de la Communauté.
En 1983, il choisit de maintenir la France dans le Système monétaire européen contre ceux qui préconisent le repli. En 1992 il provoque un référendum sur le Traité de Maastricht.
Helmut Kohl, chancelier de la RFA et lui, avec l’adoption du Traité atteignent leur objectif de concrétisation d’un marché transnational intégré. La poignée de main de François Mitterrand et d’Helmut Kohl devant l’ossuaire de Douaumont est l’un des gestes le plus symbolique de la réconciliation franco-allemande le 22 septembre 1984.
Helmut SCHMIDT (1918-2015)
Né le 23 décembre 1918 à Hambourg en Allemagne. Il obtient un diplôme en Sciences Politiques et Sciences Economiques en 1949 et devient député au Bundestag en 1953 pour le SPD, parti social-démocrate. Il est plusieurs fois réélu jusqu’en 1987, avec une courte interruption entre 1962 et 1965, période pendant laquelle il occupe le poste de ministre de l’intérieur de la Ville-État de Hambourg. Il poursuit ensuite sa carrière au niveau national.
Président du groupe parlementaire du SPD au Bundestag entyre 1967 et 1969, devient ministre de la Défense en 1969 puis obtient le portefeuille du ministère de l’Economie et des Finances entre 1972 et 1974.
Après avoir été l’un des principaux acteurs de la coalition sociale-libérale sous Willy Brandt (SPD 1969-1974), il devient chancelier en 1974 et obtient le renouvellement de son mandat à 2 reprises en 1976 et 1980. Il cède la place à Helmut Kohl en 1982.
Promoteur infatigable du couple franco-allemand, Helmut Schmidt a appuyé la mise en place du Système monétaire européen lors de son passage à la chancellerie de la République Fédérale d’Allemagne. Helmut Schmidt est décédé le 10 novembre 2015 à Hambourg à 96 ans.
Simone VEIL (1927-2017)
Simone Jacob est née le 13 juillet 1927 à Nice et morte le 30 juin 2017 à Paris. Déportée à Auschwitz à l’âge de 16 ans. Rescapée avec ses deux sœurs, elle épouse Antoine Veil en 1946, puis, après des études de droit et de sciences politiques, entre dans la magistrature comme haut fonctionnaire.
En 1974 elle est nommée ministre de la Santé par le président Giscard d’Estaing qui la charge de faire adopter la loi dépénalisant le recours à l’IVG (interruption volontaire de grossesse), loi qui sera ensuite désignée comme loi Veil.
Elle est la première présidente du Parlement Européen élu au suffrage universel, fonction qu’elle occupe de 1979 à 1982. Elle est considérée comme l’une des promotrices de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne.
De 1993 à 1995, elle est ministre d’Etat, ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville au sein du gouvernement d’Edouard Balladur. Elle siège au Conseil constitutionnel de 1998 à 2007 et entre à l’académie française en 2009.
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